Sunday, June 27, 2010

L'expérience d'un mariage traditionnel

Ici au Burkina Faso, et dans plusieurs pays africains, il y a 3 cérémonies de mariage : le mariage coutumier/traditionnel, le mariage religieux et le mariage civil.


Hier Issouf m’a invité à assister à son mariage traditionnel qui s’est tenu dans un petit village en brousse à quelques 70 km à l’est de Ouagadougou dont 30 km sur le goudron et 40 km sur des routes de terre.

Comme prévu nous sommes partis à 9h00 en voitures - en fait 1 Toyota Corolla 198? dans lequel se trouvait Issouf, son porte parole et 3 amis et 1 Mercédès 1998 dans lequel se trouvait le tuteur de Issouf, 2 amis et 2 Nassaras (Richard W. et moi). Par contre nous sommes partis à la pluie, quelque chose que l’on ne pense pas à planifier car phénomène plutôt rare. Alors le petit trajet de 70 km nous a pris 4h30 – en fait le 30 km de goudron nous a pris 30 min et le 40 km de terre nous a pris 4h00 car il fallait traverser des mares d’eau assez profondes et difficiles de naviguer car les dénivellations et trous de la route ne se voyaient pas – ou bien traverser des pistes de boues pendant plusieurs mètres. Donc 1 panne de la Corolla car le carburateur/bougies noyés par l’eau et 1 batterie à terre de la Mercédès car on a oublié de fermer les phares pendant que l’on s’occupait de l’autre voiture en panne et il pleuvait toujours. Les pannes ont pris environ 2 heures à régler, et négocier la route un autre 2 heures. Nestor sortait de la voiture à chaque étendue d’eau pour assister dans le trajet à prendre pour la voiture ou bien si celle-ci était prise dans la boue il sortait pour la pousser.






Nous sommes arrivés à notre destination à 13h30 – les garçons plutôt sales à cause du trajet mais de bonne humeur et fier d’avoir réussi cette aventure (moi ça faisait longtemps que je serais retourné à la maison). Les hommes rentrent dans la cour pour saluer la famille du petit papa de la mariée (petit papa = oncle) et puisque c’est l’heure de la prière ils se mettent à prier pendant que les chrétiens s’assoient sous l’arbre et attendent gentiment pour le déroulement de la journée. Mais nous avons attendus jusqu’à 16h45 sous l’arbre pour la suite des choses, il y avait un pépin mais on ne savait pas quoi… Entre temps on nous offre du jus de petit mil, les femmes viennent saluer les hommes en se prosternant, et il y a une autre prière.

Enfin on nous convoque chez le chef du village pour procéder à la dot, et ceci se fait sous un arbre bien spécifique ou toutes les affaires du village, qui interpellent le chef, se font. La dot est assez complexe ici car il faut négocier chaque petit détail – et il y a toujours des petits détails qui se rajoutent car même si la dot devait être déjà tout négociée ce n’était pas tout à fait le cas. Issouf avait oublié que la 1ière femme du chef a le droit à quelque chose (1 mouton) donc ils ont négocié fort sur le prix du mouton – et la 2e femme du chef a aussi le droit à une considération donc encore des négociations. De plus il faut faire le partage des noix de colas qui est aussi traditionnel : colas pour le chef (les plus beaux et les plus gros), les deux épouses ainsi que tous les autres membres de la famille – et il faut en garder un certain nombre pour la famille de la mariée. Une fois toutes les négociations sont conclues, les noix de colas partagés et l’argent remis (donc la dot payée) on passe la calebasse pour boire le jus de petit mil et ensuite le plus vieux des hommes donne la bénédiction au marié et lui fait part de toute sa sagesse à propos d’un mariage réussi – que les femmes déconnent mais il faut les traiter comme des enfants et être patient avec elles.





Une fois cette cérémonie terminé le couple est marié de façon légitime devant la communauté – une communauté dirigé par les hommes car je suis la seule femme à assister à cette cérémonie (la mariée n’est pas présente).







Par la suite nous marchons quelques mètres pour retrouver la cour du père de la mariée (il n’y est pas mais pas grave le grand-père y est) – on lui remet les noix de colas, on prend quelques photos et on repart vers le premier arbre qui nous a accueilli.




Là on nous sert un repas de Tô sauce gluante, riz gras et riz sauce avec du mouton, poulets et poissons frits et encore du jus de petit mil – tout en quantité phénoménale. C’est maintenant à ce moment ci que la mariée fait acte de présence et que le marié doit subir les plaisanteries des filles du village – celles-ci trouvent toutes sortes de moyens pour ne pas laisser partir le marié ou ses invités. Il faut payer cher pour enfin se faire libérer et prendre la route.



La dot, les visites, manger et les plaisanteries ont pris 1h30. On a repris la route vers 18h15, en espérant que l’on puisse traverser les quelques mares d’eau encore existant avant la tombée du soleil. Le retour a été beaucoup mieux et nous sommes arrivés à la cour de la famille d’Issouf vers 20h pour faire nos salutations à la famille du marié – ou nous avons encore mangé du riz avec poisson frit et du jus de petit mil. Rentré à la maison il était 21h15 et complètement brûlé.

Issouf et moi avons parlé un peu de la journée et il m’a fait savoir que le petit pépin qui nous a fait attendre si longtemps c’est que la nourriture n’était pas prête car les femmes ne croyaient pas que nous allions nous rendre au village à cause de la pluie. Il m’a aussi fait part que le village allait parler de son mariage traditionnel pendant 100 ans car s’était du jamais vue d’avoir des Nassaras assister et que la plupart des enfants n’avaient jamais vu un blanc ni une photo. Il était fier de la journée.

Une journée vraiment intéressante. Et ou est la mariée et bien elle est toujours au village et y restera jusqu’à la date du mariage religieux. En plus aucune marque d’affection entre le couple – les marques d’affections publiques étant extrêmement rares.

Pour ce qui est de ma semaine – rien de spécial à signaler sauf

1) J’ai rencontré une ancienne volontaire CUSO qui est venue passer ses vacances au Burkina Faso (c’est en fait sa 3e année de suite qu’elle passe son mois de vacances au BF) – c’est quand même quelque chose qui m’a surpris mais elle adore ce pays et elle s’est faite de très bonnes amitiés. C’est sûrement un élément de la recette pour aimer ce pays, c’est de se faire de bonnes amitiés et être assez jeune pour s’en faire car 70% de la population a moins de 30 ans. Les gens de mon âge sont plus rares et encore plus rare sont ceux qui parlent le français et quelque peu éduqués. Je n’ai pas encore eu cette chance de me faire de bonnes amitiés.

2) Dans la cour juste à côté du bureau habite une famille et mardi j’ai entendu un enfant pleurer longtemps et à plusieurs reprises parce qu’il se faisait battre. Il semblerait que c’est la façon de bâtir le caractère et les poumons. Il n’y a pas de DPJ ici et on n’a pas le droit à l’interférence – mais ça marque et on ne sait pas ou se foutre avec notre colère et notre impuissance.

3) Il y a des coins à Ouaga qui sont assez sympathiques – comme la rue Kwamé- N’ Krumah ou se trouve les discothèques, des restos chics, les banques, de bons hôtels et les magasins « haut de gamme » - ou bien la zone résidentielle Du Bois ou se retrouvent plusieurs expatriés qui travaillent à très bons salaires et ou on peut se balader à la tombée du soleil car c’est éclairé et il y a un gardien à chaque porte et les maisons sont bien entretenues avec de beaux jardins et leurs déchets sont déposés je ne sais pas trop ou (peut-être dans mon quartier?)- ou encore le quartier Westmount de Ouaga 2000 qui fait tellement ridicule avec les grosses cabanes de millions de $$$ à côté de petites chiottes en banco. Quand on se promène dans ces petits coins de la ville on a presque l’impression d’être dans un autre pays et j’imagine que ceux qui y habitent ou qui y travaillent vivent une toute autre expérience que moi car ils sont dans un autre monde, un monde un peu plus Occidental ….

Bonne semaine à tous.

1 comment:

  1. Salut Michelle,
    Je vois que tu vis des expériences qui t'en apprennent davantage sur les moeurs et les pratiques des Burkinabés. Je suis toujours étonnée puis désolée de constater comme il est difficile pour les hommes de vivre des rapports sains avec les femmes. Tu épouses une femme mais aucune marque d'affection doit se manifester.... Imagine quand cette même femme souffre ou pleure....à quel support doit-elle s'attendre?

    Je t'embrasse!
    A bientôt!
    Carole

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